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ANTOINE COMPAGNON

"UN CLASSICO MODERNO"..."UN SISTEMA COMPLESSO IL CUI PRINCIPIO È IL DISORDINE"



Professore di letteratura francese all'università di Paris IV Sorbonne ed alla Columbia University, Antoine Compagnon è l'autore di Proust entre deux siécles (Seuil, 1989. In italiano: Proust tra due secoli, Einaudi, 1992).



Compagnon ha collaborato all'edizione di A la recherche du temps perdu (Bibliothèque de la Plèiade e FOLIO) per Sodome et Gomorrhe.

Ciò che segue sono brevi ma significativi stralci di un suo lungo articolo dal titolo Un classique moderne pubblicato sul numero speciale di MAGAZINE LITTERAIRE , 4° trimestre 2000, intitolato Le siècle de Proust. De la Belle Epoque à l'an 2000.



Si A la recherche du temps perdu est devenu le classique de l'an 2000, ce n'est pas, ou pas seulement, au sens de la classe, du panthéon scolaire et universitaire, et ce n'est pas non plus, ou si peu, au sens du classicisme comme amour de l'ordre, de l'équilibre et de la réserve. Proust ne se lit pas tant que cela à l'école, et les proportions de son œuvre sont peu harmonieuses.

La Recherche est un classique parce que chaque génération en renouvelle la signification et la portée. Et si chaque génération l'enrichit quand elle en prend possession, c'est parce que cette œuvre n'est pas impeccable, close sur elle-même, achevée : " Le livre de Proust, disait Reynaldo Hahn, n'est pas un chef-d'œuvre si l'on appelle chef-d'œuvre une chose parfaite et de plan irréprochable." Le vrai chef-d'œuvre n'est pas canonique.
Parce qu'il divise, parce qu'il est complexe, il a en lui le pouvoir de devenir classique.

(...)

Il y a beaucoup de raisons, et des plus diverses, à l'ascension de la Recherche au firmament des lettres, mais la plus cruciale semble sa complexité. C'est elle qui en fait un monde qu'on parcourt à chaque fois autrement, et c'est elle que Proust visait quand il critiquait les grandes œuvres du xix1' siècle : il songeait à leur manque de complexité, ou de conscience préalable de leur complexité. Dans La Prisonnière encore, le narrateur, écoutant le septuor de Vinteuil chez les Verdurin, reconnaît la complexité propre à l'œuvre moderne dans le passage de la sonate au septuor : une phrase de l'œuvre ancienne y revient, " la même et pourtant autre, comme reviennent les choses dans la vie".

Définir le classique par la complexité, cela a l'air d'une provocation. Est complexe ce qui ne peut se rapporter à une loi unique, ce qui ne peut se réduire à une idée simple. Or l'unité et la simplicité définissent le classicisme. Proust n'est donc pas classique en ce sens. Et Le Temps retrouvé formule une loi esthétique, fait de la théorie de la mémoire involontaire le principe de l'œuvre à faire.

(...)

Mais la loi esthétique du Temps retrouvé n'empêche pas (...) que le modèle du roman proustien soit complexe. Oui, il y a une loi, mais c'est une loi de complication, un peu comme le deuxième principe de la thermodynamique – celui d'entropie - est un principe de désordre croissant.

La Recherche est un système complexe, non parce que elle n'a pas de principe, mais parce que son principe est le désordre: Proust a compris que le désordre était l'état du monde.




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1998